Artisanat : le savoir-faire du papier Antemoro

À Madagascar, Dame Nature est une véritable muse. Elle est à l’origine des objets artisanaux les plus étonnants : la soie, les sculptures Zafimaniry, les bijoux en corne de zébu, les tapis en mohair ainsi que les vanneries en raphia ou en bambous. Si vous passez par Ambalavao, une ville pittoresque située au sud de Fianarantsoa, n’hésitez pas à faire un détour à la fabrique de papier Antemoro. Vous y découvrirez (presque) tous les secrets de cette feuille de papier à la fois décorative et sacrée.

L’histoire du papier Antemoro

La légende raconte que des Arabes se seraient échoués sur la côte sud-est de la Grande Île au XIIe siècle. Ils se seraient intégrés à la tribu locale – les « Antemoro » (ou « ceux du rivage ») – et auraient répandu l’Islam dans la région. Comme ils n’avaient pu sauver qu’un seul Coran du naufrage, ils ont décidé de perpétuer les sourates en les reproduisant sur du papier fait d’écorces d’un bois local appelé « avoha ».

Cette sorte de papyrus deviendra ce qu’on appelle aujourd’hui le papier Antemoro. Il prendra une valeur sacrée, car il servira non seulement à transmettre des textes religieux écrits en « sorabe » – une calligraphie arabo-malgache – mais aussi des traités d’astrologie et des formules magiques. Certains tradipraticiens s’en servent encore d’ailleurs pour préparer leurs remèdes traditionnels. Ils plongent les manuscrits dans des décoctions afin de recueillir l’encre qui aurait des pouvoirs de guérison.

Le procédé de fabrication originel du papier Antemoro est un secret bien scellé. Le seul à le détenir est l’entrepreneur français Pierre Mathieu – cofondateur de la manufacture à Ambalavao –, qui le tient lui-même d’un certain M. Armand, un Antemoro – qui est aujourd’hui décédé.

Notez qu’outre la manufacture de papier Antemoro, Ambalavao réserve d’autres surprises aux visiteurs : ses fabriques de soie, son marché de zébu et ses vignes gorgées de soleil produisant un vin goûteux.

La fabrication du papier Antemoro

L’avoha est un mûrier sauvage qui ne se trouve que sur la côte Est de Madagascar – entre Toamasina et Tolagnaro. Cela explique pourquoi le papier Antemoro est essentiellement confectionné dans cette partie de la Grande Île. Les voyageurs se font notamment un plaisir de ramener de leurs vacances du papier Antemoro, reconnaissable à sa teinte blanc cassé et à sa texture épaisse et granuleuse.

Alors comment ce papier ancestral est-il réalisé ? Dans la fabrication à l’ancienne – comme rapportée par Flacourt – les écorces d’avoha sont bouilles avec un mélange d’eau et de cendres dans une grande marmite pendant près d’une journée. La bouillie qui en résulte est transformée en une pâte à laquelle on verse un peu d’eau. Elle est ensuite égouttée puis étalée sur des feuilles de bananiers afin de faire sécher.

De nos jours, il est d’usage de répartir la pâte sur un tissu disposé dans un tamis. Elle est plongée dans un bac d’eau, puis drainée afin d’obtenir un résultat plus homogène. Il n’est pas rare que les artisans déposent des pétales de fleurs sur le papier encore mouillé. Pour qu’elles se fixent durablement, une deuxième couche de pâte de papier est ajoutée avant de le porter au soleil.

Les objets créés avec le papier Antemoro

D’objet sacré, le papier Antemoro a pris une vocation décorative. Il est utilisé aujourd’hui pour faire des carte-postales, des sacs, des papiers à lettres, des enveloppes, de la reliure, des emballages, des albums, des cadres photo, etc. Il trouve également sa place dans l’ameublement ou pour recouvrir les abat-jours.

Quelle que soit son utilisation, le papier Antemoro a su garder un charme magique qui a traversé le temps.

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